A la mémoire de John Russell

Cet album tire ses sons d’improvisations générées par un beau violon acoustique, quelques dizaines d’oiseaux fraîchement réveillés, des espaces très réverbérants, un Mirecourt hurlant branché dans un ampli Hot Rod, des gymnases, chapelles et bords de rivière, une voix disant des mots beaux et crus, la nostalgie des westerns de l’enfance, un alto monté avec des cordes de guitares électriques et la mémoire de ceux partis trop tôt.

Cet album tire son inspiration d’un époque cloisonnée à l’horizon incertain, parcourue de mirages et saturée de faux-semblants, dont seules la créativité et l’invention semblent offrir un ciel décent. Il s’est fait en serpentant sur des voies transversales, à l’écoute des instants et des lieux traversés, pour mener à des espaces sonores atypiques et habités. Sa musique est en archipel, faite d’îlots parfois disparates mais tous reliés entre eux par la curiosité et l’implication que requiert la pratique musicale en solitaire. Tantôt lyrique, bruitiste, aérienne, répétitive ou riche de sens, cette musique de l’instant s’offre à l’auditeur curieux, prêt à suivre un chemin instable et escarpé qui mène là où la grande route ne conduit pas.

Cet album tire son nom de la rencontre fortuite d’un généreux radis noir et de la pointe d’un couteau birman qui fit jaillir d’un blanc éclatant les mots Noir Paradis de la sombre robe du sculptural légume. 
Il devenait par sa scarification même, l’évocation du Magritte questionnant la réalité des choses à travers son « ceci n’est pas une pipe », tout comme la promesse exotique d’un sex-toy vegan. 
En bref, un titre oxymore, à la fois plein d’espoir et angoissé, qui offre son lot de promesses poétiques, soniques et lubriques.